JCVD, le ket de Bruxelles, est de retour
ENTRETIEN
Jean-Claude Van Varenberg, fils de fleuristes bruxellois, avait un rêve : devenir acteur. Pour renforcer son physique frêle, ses parents l'incitent à faire du karaté. Ce sera sa rampe de lancement pour tenter sa chance aux Etats-Unis, avec 2.000 dollars en poche, et devenir Jean-Claude Van Damme, star des films de karaté. Là-bas, après quelques années de galère et pas mal de petits boulots, il connaît la gloire, se fait une place à Hollywood, touche le rêve américain, avant la chute, les échecs, l'enfer de la drogue, les divorces. Il en parle dans le film-vérité JCVD. Rencontre avec un type étonnant, voire désarçonnant. Qui vit à Hong Kong.
Comment avez-vous vécu cette confrontation entre vous-même et votre image ?
J'ai connu une montée fulgurante grâce au succès de Bloodsport (Tous les coups sont permis). Je suis resté sur cette montagne des années, jusqu'à être lassé, jusqu'à chuter et à devenir un autre Van Damme. Il n'y a pas deux Van Damme. Il n'y en a qu'un, qui a une certaine philosophie de la vie, avec des mots qui sont lancés à l'écran et qu'on peut comprendre si on comprend l'alphabet de cette grammaire. Cela commence par AB et finit par YZ. Il y a ceux qui comprennent mon langage, d'autres pas du tout. C'est une question de pensée.
Quand j'ai joué JCVD, j'étais en bipolarité totale. Quand je me suis vu à l'écran, j'étais en tripolarité. Je me suis vu en tant qu'audience. J'ai vu un Van Damme avec ses propres choses intérieures et le Van Damme normal qui dit ses textes et fait son travail d'acteur.
« JCVD » n'est pas un film anodin. Qu'en avez-vous retenu ?
Au début, cette histoire m'a fait un peu peur. Je me demandais si on voulait se foutre de ma gueule. Mais en lisant le scénario, j'ai vu quelque chose d'intéressant. On trace un certain passé. Il y a deux façons de percevoir la vie : celle de la société normale, un pas en avant, un pas en arrière, gauche, droite, feu rouge, feu vert ; celle d'une personne qui avait son propre langage, qui est partie de Belgique à l'âge de 18 ans, est revenue, est repartie. En faisant vingt fois le tour de la Terre, avec tous ces gens, ces langues, ces pays, ces philosophies, on devient une personne assez riche.
Quel plaisir de jouer JCVD ?
Je ne vais pas dire « Many faces of the diamond », car on n'est pas à Anvers et je ne suis pas un diamant. Mais j'ai eu la chance de jouer plusieurs dimensions dans ce rôle de quasi-vérité. Quand on rentre dans la poste, c'est un peu comme Un après-midi de chien. Puis, c'était bien d'avoir cette star qui se confie à la caméra. Mabrouk était d'accord avec cette idée. Il m'a installé sur cette chaise qui lévite. Cela m'a donné une isolation totale. Je n'ai pas à me justifier. J'avais envie de parler avec une caméra qui va montrer des choses différentes à mon sujet. Mabrouk m'a dit d'y aller à fond, car je suis un mec qui n'a rien à prouver. J'ai 47 ans, je suis parti, je suis revenu, je suis monté, je suis descendu. Heureusement qu'il y a des descentes ! Car quand je faisais des films de studios, j'ai complètement décollé. Tu n'es plus connecté. Or, je suis un garçon de la rue. Je suis né dans une famille modeste. J'ai fait du karaté. Ce fut ma seule carte de visite aux Etats-Unis.
On est tous câblés pour quelque chose. Ce n'est pas ma faute si je peux faire ce que je fais, et ce n'est pas ma faute si d'autres font mieux des choses que je ne sais pas faire. J'ai des multipersonnalités. Je fais attention à beaucoup de choses. Parfois, je m'égare. Là, j'écoute la table d'à côté tout en étant attentif à notre conversation. Ce n'est même pas un don, c'est une question de contrôle.
Donc, vous êtes « aware » ?
Ce terme a surtout eu des effets en France. J'ai été blessé par la presse. J'étais comme un aigle – même si je ne me compare pas à un aigle – car il a beaucoup de sincérité, d'honneur et aime la liberté. J'étais un aigle avec les ailes goudronnées à cause de mon divorce, des échecs. Donc, si je faisais JCVD, je devais parler de tout ! Il y a des dégâts, mais ce sont des dégâts de la vie. A 20-30 ans, on veut tous changer les gens. A la quarantaine, on se rend compte qu'on n'a rien à changer, qu'il ne faut pas trop s'occuper des autres, même si on a bon cœur. Sinon, tu te répands trop et tu rentres à la maison comme un clown malheureux.
Vous regrettez ?
Il ne faut rien regretter dans la vie, car elle passe tellement vite. On a tous une destinée. Ce n'est pas une question de chance ou d'intelligence. Certains sont plus câblés pour faire des choses meilleures que d'autres. Certains acteurs ont un dialogue super, un jeu de vérité, de l'expérience, mais la gueule ne passe pas. On ne sait pas pourquoi. Moi, je suis un acteur qui a fait son chemin. Avec une gueule qui passe !
Votre envie pour demain ?
Retourner aux Etats-Unis en prouvant que je peux faire un film fini que j'ai financé, produit, écrit. Que je suis un mec propre dans sa tête.
Quel genre de film ?
Fool love est un film spécial et dangereux à faire. Deux films en un. Un drame surprenant. J'ai une chance sur mille de le réussir. J'exige des choses de moi qui se formulent par moi-même. Il faut donner une faveur à sa pensée ! Je vais le faire avec le directeur photo de Full metal jacket.
Dans « JCVD », vous dites que les gens ont des difficultés à ne pas vous juger. De vous voir en vérité dans « JCVD », ça peut changer le regard ?
C'est possible, mais ce film montre que j'aime les gens. Je marche avec beaucoup d'amour. Je travaille à l'amitié. Les spectateurs se rendent compte que Van Damme est humain.
DATES
1960. Naissance, le 18 octobre, à Bruxelles (Berchem-Sainte-Agathe). 1978. Champion de Belgique et d'Europe de light contact. 1982. Part à Hollywood. 1983. Rue barbare, de Gilles Béhat. 1988. Bloodsport, de Newt Arnold. 1989. Kickboxer, de Mark DiSalle. Cyborg, d'Albert Pyun. 1990. Full contact et Double impact, de Sheldon Lettich. 1992. Universal soldier, de Roland Emmerich. 1994. Timecop, de Peter Hyams. 1995. Street fighter, de Steven De Souza. 1996. Mort subite, de Peter Hyams. Le grand tournoi, de Jean-Claude Van Damme. 2001. JCVD lance sa ligne de vêtements, baptisée « damage7 ».
ENTRETIEN
Jean-Claude Van Varenberg, fils de fleuristes bruxellois, avait un rêve : devenir acteur. Pour renforcer son physique frêle, ses parents l'incitent à faire du karaté. Ce sera sa rampe de lancement pour tenter sa chance aux Etats-Unis, avec 2.000 dollars en poche, et devenir Jean-Claude Van Damme, star des films de karaté. Là-bas, après quelques années de galère et pas mal de petits boulots, il connaît la gloire, se fait une place à Hollywood, touche le rêve américain, avant la chute, les échecs, l'enfer de la drogue, les divorces. Il en parle dans le film-vérité JCVD. Rencontre avec un type étonnant, voire désarçonnant. Qui vit à Hong Kong.
Comment avez-vous vécu cette confrontation entre vous-même et votre image ?
J'ai connu une montée fulgurante grâce au succès de Bloodsport (Tous les coups sont permis). Je suis resté sur cette montagne des années, jusqu'à être lassé, jusqu'à chuter et à devenir un autre Van Damme. Il n'y a pas deux Van Damme. Il n'y en a qu'un, qui a une certaine philosophie de la vie, avec des mots qui sont lancés à l'écran et qu'on peut comprendre si on comprend l'alphabet de cette grammaire. Cela commence par AB et finit par YZ. Il y a ceux qui comprennent mon langage, d'autres pas du tout. C'est une question de pensée.
Quand j'ai joué JCVD, j'étais en bipolarité totale. Quand je me suis vu à l'écran, j'étais en tripolarité. Je me suis vu en tant qu'audience. J'ai vu un Van Damme avec ses propres choses intérieures et le Van Damme normal qui dit ses textes et fait son travail d'acteur.
« JCVD » n'est pas un film anodin. Qu'en avez-vous retenu ?
Au début, cette histoire m'a fait un peu peur. Je me demandais si on voulait se foutre de ma gueule. Mais en lisant le scénario, j'ai vu quelque chose d'intéressant. On trace un certain passé. Il y a deux façons de percevoir la vie : celle de la société normale, un pas en avant, un pas en arrière, gauche, droite, feu rouge, feu vert ; celle d'une personne qui avait son propre langage, qui est partie de Belgique à l'âge de 18 ans, est revenue, est repartie. En faisant vingt fois le tour de la Terre, avec tous ces gens, ces langues, ces pays, ces philosophies, on devient une personne assez riche.
Quel plaisir de jouer JCVD ?
Je ne vais pas dire « Many faces of the diamond », car on n'est pas à Anvers et je ne suis pas un diamant. Mais j'ai eu la chance de jouer plusieurs dimensions dans ce rôle de quasi-vérité. Quand on rentre dans la poste, c'est un peu comme Un après-midi de chien. Puis, c'était bien d'avoir cette star qui se confie à la caméra. Mabrouk était d'accord avec cette idée. Il m'a installé sur cette chaise qui lévite. Cela m'a donné une isolation totale. Je n'ai pas à me justifier. J'avais envie de parler avec une caméra qui va montrer des choses différentes à mon sujet. Mabrouk m'a dit d'y aller à fond, car je suis un mec qui n'a rien à prouver. J'ai 47 ans, je suis parti, je suis revenu, je suis monté, je suis descendu. Heureusement qu'il y a des descentes ! Car quand je faisais des films de studios, j'ai complètement décollé. Tu n'es plus connecté. Or, je suis un garçon de la rue. Je suis né dans une famille modeste. J'ai fait du karaté. Ce fut ma seule carte de visite aux Etats-Unis.
On est tous câblés pour quelque chose. Ce n'est pas ma faute si je peux faire ce que je fais, et ce n'est pas ma faute si d'autres font mieux des choses que je ne sais pas faire. J'ai des multipersonnalités. Je fais attention à beaucoup de choses. Parfois, je m'égare. Là, j'écoute la table d'à côté tout en étant attentif à notre conversation. Ce n'est même pas un don, c'est une question de contrôle.
Donc, vous êtes « aware » ?
Ce terme a surtout eu des effets en France. J'ai été blessé par la presse. J'étais comme un aigle – même si je ne me compare pas à un aigle – car il a beaucoup de sincérité, d'honneur et aime la liberté. J'étais un aigle avec les ailes goudronnées à cause de mon divorce, des échecs. Donc, si je faisais JCVD, je devais parler de tout ! Il y a des dégâts, mais ce sont des dégâts de la vie. A 20-30 ans, on veut tous changer les gens. A la quarantaine, on se rend compte qu'on n'a rien à changer, qu'il ne faut pas trop s'occuper des autres, même si on a bon cœur. Sinon, tu te répands trop et tu rentres à la maison comme un clown malheureux.
Vous regrettez ?
Il ne faut rien regretter dans la vie, car elle passe tellement vite. On a tous une destinée. Ce n'est pas une question de chance ou d'intelligence. Certains sont plus câblés pour faire des choses meilleures que d'autres. Certains acteurs ont un dialogue super, un jeu de vérité, de l'expérience, mais la gueule ne passe pas. On ne sait pas pourquoi. Moi, je suis un acteur qui a fait son chemin. Avec une gueule qui passe !
Votre envie pour demain ?
Retourner aux Etats-Unis en prouvant que je peux faire un film fini que j'ai financé, produit, écrit. Que je suis un mec propre dans sa tête.
Quel genre de film ?
Fool love est un film spécial et dangereux à faire. Deux films en un. Un drame surprenant. J'ai une chance sur mille de le réussir. J'exige des choses de moi qui se formulent par moi-même. Il faut donner une faveur à sa pensée ! Je vais le faire avec le directeur photo de Full metal jacket.
Dans « JCVD », vous dites que les gens ont des difficultés à ne pas vous juger. De vous voir en vérité dans « JCVD », ça peut changer le regard ?
C'est possible, mais ce film montre que j'aime les gens. Je marche avec beaucoup d'amour. Je travaille à l'amitié. Les spectateurs se rendent compte que Van Damme est humain.
DATES
1960. Naissance, le 18 octobre, à Bruxelles (Berchem-Sainte-Agathe). 1978. Champion de Belgique et d'Europe de light contact. 1982. Part à Hollywood. 1983. Rue barbare, de Gilles Béhat. 1988. Bloodsport, de Newt Arnold. 1989. Kickboxer, de Mark DiSalle. Cyborg, d'Albert Pyun. 1990. Full contact et Double impact, de Sheldon Lettich. 1992. Universal soldier, de Roland Emmerich. 1994. Timecop, de Peter Hyams. 1995. Street fighter, de Steven De Souza. 1996. Mort subite, de Peter Hyams. Le grand tournoi, de Jean-Claude Van Damme. 2001. JCVD lance sa ligne de vêtements, baptisée « damage7 ».