Marie Gillain, tout en voix et sans peur du ridicule
L'actrice belge réalise là une de ses envies : doubler un personnage de dessin animé. C'est aussi un bon baromètre de sa propre popularité.
Angelina Jolie et Marie Gillain donnent leur voix à Tigresse, la plus intrépide des maîtres kung-fu et amie de la grue, du singe et de la vipère, tous as de l’art martial. © REPORTERS / Capital et FRANçOIS LO PRESTI / AF
Kung fu panda
Bonne surprise que cette nouvelle production 3D de DreamWorks (quatre ans de travail). Soignée, drôle, énergique, attachante. A consommer en famille, car impossible de ne pas craquer pour ce panda grassouillet et maladroit qui se rêve maître kung-fu alors qu'il a des allures de grosse peluche.
L'idée du film, réalisé par John Stevenson et Mark Osborne, est d'avoir de la persévérance dans ses rêves, d'œuvrer pour l'excellence de soi et de donner confiance en soi. Le vecteur : Po, qui poursuit son rêve dans une Chine anonyme où les pandas comme lui sont élevés par des grues et servent des bols de nouilles chinoises à des lapins et des cochons d'Inde.
Le scénario reste simple et n'atteint pas les profondeurs d'un Pixar, mais la réalisation suscite l'admiration. A travers quelques belles courses-poursuites, des décors d'estampes chinoises, des répliques pleines d'humour et la conviction que la plus grande faiblesse peut devenir la plus grande force.
Et pour ceux qui aiment l'anecdote chiffrée, en voici quelques-unes : il a fallu 448 personnes pour créer Kung fu panda ; le maître Grue a 6.019 plumes sur le corps ; 1.040.229 confettis sont utilisés dans la scène où Po est élu guerrier du dragon ; la chaise que Po désintègre avec le feu d'artifice est composée de 953.593 particules.
ENTRETIEN
En attendant Wall-E, le nouveau Pixar (sortie le 30 juillet), et le film d'animation Star wars : the clone wars (août), voici le sympa Kung fu panda, labellisé DreamWorks. De quoi animer l'affiche estivale et lui donner un joli coup de jeunesse.
Cette jeunesse, elle prend aussi les traits de notre compatriote Marie Gillain, que nous avons rencontrée à Paris pour évoquer avec elle sa première expérience de doublage de dessin animé. Si les Américains ont Angelina Jolie pour donner voix à la tigresse de Kung fu panda, les francophones, eux, ont Marie Gillain. Flatteur, non ?
Votre petite fille, Dune, a-t-elle vu le film ?
Oui. Elle s'identifie davantage aux princesses roses, mais elle a adoré l'histoire de ce panda se rêvant maître de kung-fu, même s'il n'y a pas de rose dedans ! Je trouve sympa qu'il y ait ce genre-là dans ma filmographie. Je préfère que ma fille partage ça, avec ses copains, plutôt que de devoir dire que je joue une alcoolique-droguée-prostituée.
Depuis que vous êtes maman, le choix des rôles s'est-il modifié ?
Non. Car je n'ai pas forcément envie de montrer mes films à ma fille. Si, plus tard, elle manifeste un intérêt pour tel ou tel film, on verra. Mais depuis qu'elle est dans ma vie, je suis plus sensible à certains styles. Les films gore, les thrillers, les films violents et sadiques ne me procurent plus de plaisir. Je ne cours pas après ce genre. Je préfère des films dégageant des émotions positives. Je suis très heureuse, par exemple, d'être dans Magique, de Philippe Muyl.
Que ressent-on d'être sur le même pied qu'Angelina Jolie, la voix anglophone de Tigresse ?
C'est flatteur. Il y a pire comme référence féminine.
Comment êtes-vous entrée dans cette aventure de doublage d'un dessin animé ?
J'en avais envie depuis un certain temps. La Paramount distribuant Magique, j'ai rencontré son président sur le tournage, au Québec. Il m'a demandé si j'étais tentée par l'aventure du doublage.
Qu'implique de ne jouer qu'avec sa voix ?
Dans le métier d'actrice, on est toujours un peu contrainte de surveiller son image. Alors qu'ici, c'est génial, on peut arriver en pantoufles au studio ! On n'est que dans un travail de projection qui passe par la voix. Mais l'exercice est très difficile, car cela demande une technique. Pour moi, doubler fait un peu le même effet que de chanter, car on a peur de se sentir ridicule, sans relief. Il faut donc mettre son ego et sa peur du ridicule au vestiaire. En doublage, chaque mot prononcé a son importance et est véhiculé par une émotion propre. Si on n'est pas à 100 % dans l'émotion, c'est totalement plat. Vous avez une image forte et, derrière, la voix ne suit pas. Il faut donc y aller !
Le fait d'avoir fait du théâtre vous a-t-il aidée ?
Sans doute. Grâce à la scène, j'ai un rapport instinctif avec ce que j'entends. Mais pour moi, le travail de la voix est aussi un travail de composition. C'est ça aussi qui est excitant. L'enjeu est de faire oublier au spectateur qu'on double.
Depuis une poignée d'années, les studios d'animation cherchent des castings « voix ». Est-ce important pour une actrice de faire partie de ce genre d'aventure ?
Oui, car ces films ont une place à part entière dans le cinéma. C'est aussi un baromètre de popularité pour soi-même. C'est une belle opportunité et une belle exposition.
L'excellence de soi, base du kung-fu, veut dire quelque chose pour vous ?
Absolument. J'aime cette notion de travail, d'acharnement, de persévérance qui, un jour ou l'autre, porte ses fruits. C'est un bon message à intégrer dans ma vie de comédienne, car ce métier n'est pas toujours évident à gérer d'un point de vue émotionnel et peut vous mettre dans une situation de facilité quand les projets s'enchaînent. J'aime bien me dire que j'ai donné ma voix à une acharnée du travail qui arrive à ses fins comme les sportifs de haut niveau.
En débarquant à 16 ans dans ce métier, je n'imaginais pas que, derrière le merveilleux de ce boulot, il fallait être forte. Garder sa vulnérabilité d'artiste, mais avoir une force intérieure. C'est une affaire de confiance en soi. Et ça va mieux de ce point de vue à 30 ans. Avoir 30 ans est un bon « boosteur » d'énergie, car on est amené à faire quelques bilans et à aller de l'avant. Aujourd'hui, chaque rencontre est une étape précieuse. Je n'ai plus envie de perdre mon temps, de m'éparpiller. Chaque film choisi est donc important.
Les coulisses illustrées du film
Plus de 300 images, les story-boards, les secrets de réalisation, le montage final, la symbolique des couleurs dans la culture chinoise, les théories du feng shui… Les pages de cet ouvrage richement illustré, présenté comme le making of du film, sont un dictionnaire. Pour découvrir le langage du dernier-né des studios DreamWorks. Pour découvrir l'incroyable travail réalisé par les animateurs, les scénaristes, les dessinateurs afin de donner vie aux personnages hauts en couleur de ce film d'animation tous publics, très sympathique et incongru.
Le visuel l'emporte largement sur l'écrit, ce qui permet de mettre ce beau livre dans les mains de jeunes spectateurs sans les rebuter. Car on y trouve une façon claire, simple, facile et agréable de pénétrer dans les coulisses d'un film d'animation.
Exemple : pour révéler les traits de caractère de Shifu, son pelage et sa robe sont dans les tons blancs, oranges et bruns, des couleurs qui représentent l'honneur, l'énergie et le dévouement, selon la théorie des couleurs du film. Autre exemple : un des premiers visuels de Po, qui ne ressemble en rien à la composition finale, a servi de base à la construction du personnage et de l'ensemble du film. Originellement modelé d'après un macaque, le maître singe a finalement pris la forme d'un singe doré.
Quant à Tai Lung, les dessinateurs se sont inspirés du maquillage de théâtre chinois pour dessiner son pelage facial. La couleur dans ses yeux est une contradiction artistique voulue par l'équipe pour signifier que Tai Lung est un personnage véritablement complexe. En apparence, il n'est que haine, mais ses yeux laissent entrevoir la possibilité d'une rédemption.
L'album, de belle présentation, passe en revue tous les personnages et tous les lieux. Ainsi, comme le dit le réalisateur Mark Osborne, « lorsque nous avons eu besoin d'un lieu sombre pour l'entraînement de Tai Lung, nous avons demandé à l'équipe artistique de créer quelque chose de mystique. Tel un Stonehenge version chinoise. Pour en faire un monde empreint d'histoire ». Et le livre de proposer le visuel des ébauches.
Le making of de « Kung fu panda » , Tracey Miller-Zarneke, RTL Éditions – Editions Luc Pire, 192 p., 29 euros
L'actrice belge réalise là une de ses envies : doubler un personnage de dessin animé. C'est aussi un bon baromètre de sa propre popularité.
Angelina Jolie et Marie Gillain donnent leur voix à Tigresse, la plus intrépide des maîtres kung-fu et amie de la grue, du singe et de la vipère, tous as de l’art martial. © REPORTERS / Capital et FRANçOIS LO PRESTI / AF
Kung fu panda
Bonne surprise que cette nouvelle production 3D de DreamWorks (quatre ans de travail). Soignée, drôle, énergique, attachante. A consommer en famille, car impossible de ne pas craquer pour ce panda grassouillet et maladroit qui se rêve maître kung-fu alors qu'il a des allures de grosse peluche.
L'idée du film, réalisé par John Stevenson et Mark Osborne, est d'avoir de la persévérance dans ses rêves, d'œuvrer pour l'excellence de soi et de donner confiance en soi. Le vecteur : Po, qui poursuit son rêve dans une Chine anonyme où les pandas comme lui sont élevés par des grues et servent des bols de nouilles chinoises à des lapins et des cochons d'Inde.
Le scénario reste simple et n'atteint pas les profondeurs d'un Pixar, mais la réalisation suscite l'admiration. A travers quelques belles courses-poursuites, des décors d'estampes chinoises, des répliques pleines d'humour et la conviction que la plus grande faiblesse peut devenir la plus grande force.
Et pour ceux qui aiment l'anecdote chiffrée, en voici quelques-unes : il a fallu 448 personnes pour créer Kung fu panda ; le maître Grue a 6.019 plumes sur le corps ; 1.040.229 confettis sont utilisés dans la scène où Po est élu guerrier du dragon ; la chaise que Po désintègre avec le feu d'artifice est composée de 953.593 particules.
ENTRETIEN
En attendant Wall-E, le nouveau Pixar (sortie le 30 juillet), et le film d'animation Star wars : the clone wars (août), voici le sympa Kung fu panda, labellisé DreamWorks. De quoi animer l'affiche estivale et lui donner un joli coup de jeunesse.
Cette jeunesse, elle prend aussi les traits de notre compatriote Marie Gillain, que nous avons rencontrée à Paris pour évoquer avec elle sa première expérience de doublage de dessin animé. Si les Américains ont Angelina Jolie pour donner voix à la tigresse de Kung fu panda, les francophones, eux, ont Marie Gillain. Flatteur, non ?
Votre petite fille, Dune, a-t-elle vu le film ?
Oui. Elle s'identifie davantage aux princesses roses, mais elle a adoré l'histoire de ce panda se rêvant maître de kung-fu, même s'il n'y a pas de rose dedans ! Je trouve sympa qu'il y ait ce genre-là dans ma filmographie. Je préfère que ma fille partage ça, avec ses copains, plutôt que de devoir dire que je joue une alcoolique-droguée-prostituée.
Depuis que vous êtes maman, le choix des rôles s'est-il modifié ?
Non. Car je n'ai pas forcément envie de montrer mes films à ma fille. Si, plus tard, elle manifeste un intérêt pour tel ou tel film, on verra. Mais depuis qu'elle est dans ma vie, je suis plus sensible à certains styles. Les films gore, les thrillers, les films violents et sadiques ne me procurent plus de plaisir. Je ne cours pas après ce genre. Je préfère des films dégageant des émotions positives. Je suis très heureuse, par exemple, d'être dans Magique, de Philippe Muyl.
Que ressent-on d'être sur le même pied qu'Angelina Jolie, la voix anglophone de Tigresse ?
C'est flatteur. Il y a pire comme référence féminine.
Comment êtes-vous entrée dans cette aventure de doublage d'un dessin animé ?
J'en avais envie depuis un certain temps. La Paramount distribuant Magique, j'ai rencontré son président sur le tournage, au Québec. Il m'a demandé si j'étais tentée par l'aventure du doublage.
Qu'implique de ne jouer qu'avec sa voix ?
Dans le métier d'actrice, on est toujours un peu contrainte de surveiller son image. Alors qu'ici, c'est génial, on peut arriver en pantoufles au studio ! On n'est que dans un travail de projection qui passe par la voix. Mais l'exercice est très difficile, car cela demande une technique. Pour moi, doubler fait un peu le même effet que de chanter, car on a peur de se sentir ridicule, sans relief. Il faut donc mettre son ego et sa peur du ridicule au vestiaire. En doublage, chaque mot prononcé a son importance et est véhiculé par une émotion propre. Si on n'est pas à 100 % dans l'émotion, c'est totalement plat. Vous avez une image forte et, derrière, la voix ne suit pas. Il faut donc y aller !
Le fait d'avoir fait du théâtre vous a-t-il aidée ?
Sans doute. Grâce à la scène, j'ai un rapport instinctif avec ce que j'entends. Mais pour moi, le travail de la voix est aussi un travail de composition. C'est ça aussi qui est excitant. L'enjeu est de faire oublier au spectateur qu'on double.
Depuis une poignée d'années, les studios d'animation cherchent des castings « voix ». Est-ce important pour une actrice de faire partie de ce genre d'aventure ?
Oui, car ces films ont une place à part entière dans le cinéma. C'est aussi un baromètre de popularité pour soi-même. C'est une belle opportunité et une belle exposition.
L'excellence de soi, base du kung-fu, veut dire quelque chose pour vous ?
Absolument. J'aime cette notion de travail, d'acharnement, de persévérance qui, un jour ou l'autre, porte ses fruits. C'est un bon message à intégrer dans ma vie de comédienne, car ce métier n'est pas toujours évident à gérer d'un point de vue émotionnel et peut vous mettre dans une situation de facilité quand les projets s'enchaînent. J'aime bien me dire que j'ai donné ma voix à une acharnée du travail qui arrive à ses fins comme les sportifs de haut niveau.
En débarquant à 16 ans dans ce métier, je n'imaginais pas que, derrière le merveilleux de ce boulot, il fallait être forte. Garder sa vulnérabilité d'artiste, mais avoir une force intérieure. C'est une affaire de confiance en soi. Et ça va mieux de ce point de vue à 30 ans. Avoir 30 ans est un bon « boosteur » d'énergie, car on est amené à faire quelques bilans et à aller de l'avant. Aujourd'hui, chaque rencontre est une étape précieuse. Je n'ai plus envie de perdre mon temps, de m'éparpiller. Chaque film choisi est donc important.
Les coulisses illustrées du film
Plus de 300 images, les story-boards, les secrets de réalisation, le montage final, la symbolique des couleurs dans la culture chinoise, les théories du feng shui… Les pages de cet ouvrage richement illustré, présenté comme le making of du film, sont un dictionnaire. Pour découvrir le langage du dernier-né des studios DreamWorks. Pour découvrir l'incroyable travail réalisé par les animateurs, les scénaristes, les dessinateurs afin de donner vie aux personnages hauts en couleur de ce film d'animation tous publics, très sympathique et incongru.
Le visuel l'emporte largement sur l'écrit, ce qui permet de mettre ce beau livre dans les mains de jeunes spectateurs sans les rebuter. Car on y trouve une façon claire, simple, facile et agréable de pénétrer dans les coulisses d'un film d'animation.
Exemple : pour révéler les traits de caractère de Shifu, son pelage et sa robe sont dans les tons blancs, oranges et bruns, des couleurs qui représentent l'honneur, l'énergie et le dévouement, selon la théorie des couleurs du film. Autre exemple : un des premiers visuels de Po, qui ne ressemble en rien à la composition finale, a servi de base à la construction du personnage et de l'ensemble du film. Originellement modelé d'après un macaque, le maître singe a finalement pris la forme d'un singe doré.
Quant à Tai Lung, les dessinateurs se sont inspirés du maquillage de théâtre chinois pour dessiner son pelage facial. La couleur dans ses yeux est une contradiction artistique voulue par l'équipe pour signifier que Tai Lung est un personnage véritablement complexe. En apparence, il n'est que haine, mais ses yeux laissent entrevoir la possibilité d'une rédemption.
L'album, de belle présentation, passe en revue tous les personnages et tous les lieux. Ainsi, comme le dit le réalisateur Mark Osborne, « lorsque nous avons eu besoin d'un lieu sombre pour l'entraînement de Tai Lung, nous avons demandé à l'équipe artistique de créer quelque chose de mystique. Tel un Stonehenge version chinoise. Pour en faire un monde empreint d'histoire ». Et le livre de proposer le visuel des ébauches.
Le making of de « Kung fu panda » , Tracey Miller-Zarneke, RTL Éditions – Editions Luc Pire, 192 p., 29 euros